Par le Père Jean-Louis Rouvière
Pendant encore 4 dimanches, nous lisons successivement des parties du chapitre 15 de la première lettre aux Corinthiens, au chapitre 15, qui aborde la résurrection comme dernier thème de la lettre.
Or, cette question de la résurrection nous rejoint car, même si elle est au cœur de notre foi, il devient de plus en plus difficile d’y adhérer spontanément, du fait qu’elle échappe au paradigme technologique. Plus particulièrement le corps spirituel de Jésus est ressuscité échappe à un point de vue biologique, ce qui n’empêche pas de proposer une voie de vérité d’un autre point de vue. Après tout, nous valons mieux qu’un tas de cellules. Je vous propose trois manières de soutenir que la foi en la résurrection est raisonnable, digne de raison, et non déraisonnable.
La première manière est d’abord liée à la confiance que nous pouvons avoir dans les témoignages des apôtres. Qu’est-ce qu’avait à gagner Saint Pierre et les autres apôtres à nous donner le récit d’un tel évènement ? Après la résurrection, Saint Pierre n’est pas revenu à son activité initiale de pêcheur en Galilée, mais il est parti annoncer cette bonne nouvelle de Jésus vivant, malgré sa mort, en Judée, en Samarie, et enfin à Rome où il a donné sa vie pour livrer son témoignage. Quelque chose d’inouï et de vrai s’est passé dans sa vie après sa rencontre avec Jésus et après sa mort.
La seconde manière est liée à l’argument de Saint Paul dans la lecture de ce dimanche : si le Christ n’est pas ressuscité, nos péchés ne sont pas pardonnés. Cet argument était suffisamment fort à l’époque de Saint Paul, pour que la seule perspective que les péchés ne soient pas pardonnés soit suffisamment forte pour qu’elle suffise à convaincre ses destinataires. Même si cet argument semble étrange de nos jours, nous avons encore besoin aujourd’hui que nos péchés soient pardonnés pour accéder à la vie éternelle. En effet, si je pèche contre Dieu, je ne peux pas vivre avec lui dans la vie éternelle. Or, la résurrection est le seul évènement qui nous assure de la réconciliation de Dieu avec nous. Car, après le déchainement de violence et de péchés pendant la Passion aboutissant à la mort de Jésus, sa résurrection s’interprète facilement comme le pardon de tous les péchés commis dans la passion, en lien avec nos péchés aujourd’hui.
Enfin, une troisième raison pourrait résider dans la cohérence de l’évangile et de la vie de Jésus. Jésus est passé à travers la Terre Sainte en faisant le bien, à travers des guérisons et des prodiges. Ces signes témoignent à chaque épisode qu’il est le Fils de Dieu, c’est-à-dire qu’il a un lien particulier avec Dieu, qu’il nomme son Père. S’il n’était pas ressuscité, on pourrait se dire que son Père l’aurait effectivement abandonné. Or, c’est l’inverse qui se produit. La résurrection intervient à un moment crucial et récapitulative de l’évangile : c’est un peu quitte ou double. Ce dernier grand miracle affirme définitivement qu’il est le Fils de Dieu et récapitule tous les autres, en cohérence avec l’évangile.
Ainsi, ces trois manières nous permettent d’aborder la résurrection non sur le plan de la raison biologique ou scientifique, mais de manière raisonnable. Car la raison scientifique ne saurait épuiser la raison humaine, et la profonde cohérence et le sens profond d’un tel évènement dans la vie de Jésus et de ses disciples peut aussi emporter notre adhésion personnelle, aussi bien, voire mieux qu’une démonstration scientifique, potentiellement froide. Christ est ressuscité : je peux y adhérer car le sens est tellement fort.