Par le Père Antoine VAIRON, curé
Voilà que l’actualité politique de notre pays invite bien vite les citoyens-électeurs que nous sommes à reprendre le chemin des urnes (surtout si celui-ci avait été délaissé par quelques chemins de traverses depuis quelques temps déjà). Il faut reconnaitre que peu d’entre nous ne s’attendaient à ce que cela soit si rapide.
S’il n’appartient pas, vous le savez bien, à l’Eglise de donner des indications sur la couleur du bulletin qui doit être glissé dans les urnes, il n’en reste pas moins que la question politique reste immanquablement de son domaine d’intérêt et de mission, à défaut d’être compétente en arguties d’alliances électorales. Les principes énoncés par le Concile Vatican II, sont clairs : « Certes, la mission propre que le Christ a confiée à son Église n’est ni d’ordre politique, ni d’ordre économique ou social : le but qu’il lui a assigné est d’ordre religieux. Mais, précisément, de cette mission religieuse découlent une fonction, des lumières et des forces qui peuvent servir à constituer et à affermir la communauté des hommes selon la loi divine » (Constitution Gaudium et Spes, sur le rôle de l’Eglise dans le monde de ce temps, n° 42-2).
A la vue des dernières années d’évolution de la vie politique et particulièrement législative, une question se pose, dont la gravité ne cède en rien à la complexité humaine : les députés, hommes et femmes, qui se proposent de représenter leurs concitoyens et, plus encore, exigent d’édicter le droit positif qui va servir de cadre à la vie commune, ont-ils encore la notion du bien commun ?
Une inquiétude légitime mérite d’être exprimée : toutes les lois dites sociétales de ces dernières années ont ceci de particulier que, dans le même temps, elles sont la satisfaction de désirs ou revendication individuelles et qu’elles viennent toucher les fondements même de la vie en société.
Ce n’est pas sans une véritable consternation que l’on a vu les députés sortants s’auto-congratuler d’avoir inscrit dans la constitution le ‘droit à l’avortement’ (un prétendu droit pour des actes qui consistent toujours, quels que soient les qualificatifs juridiques de notre droit positif français, à donner la mort à un être humain dans les premiers temps de son développement). Dans le même temps, il faut bien s’étonner de ce qui est une véritable paresse intellectuelle (car auto-justifiée par l’idéologie abortive) qui fait que ces mêmes responsables politiques ne proposent rien pour faire diminuer de manière notable le toujours nombre dramatiquement élevé d’avortements dans notre pays. Il faut être bien aveuglé pour ne pas reconnaître que toucher de manière aussi fréquente et répétée au non-accueil des enfants à naître blesse toute une société dans son rapport à l’avenir. Refuser d’accueillir l’enfant qui est pourtant déjà là, c’est blesser l’espérance de tout un peuple, son ouverture à la vie.
Promouvoir un mariage civil de personnes de même sexe, par nature stérile, quel que soit par ailleurs le chemin de vie de ces personnes, c’est pour des gouvernants annoncer qu’ils renoncent à ce que la famille soit le lieu de la fécondité et donc de l’avenir autre qu’individuel. Mettre en place des institutions humaines par nature stériles blesse la société dans son désir de porter et de faire grandir la vie. Et ensuite bricoler des engendrements médicalisés ou avoir la folie de demander à des mères d’être de simples porteuses d’enfants, qu’elles abandonneront, sont des substituts qui devraient faire frémir au lieu de séduire.
Et nos gouvernants actuels, ainsi que les députés sortants, s’apprêtaient à vouloir légiférer sur la fin de vie (après avoir renoncé à mettre en place une loi sur le grand-âge). Faire droit aux personnes qui veulent donner ou se donner la mort aurait blessé notre société de manière extrêmement grave et profonde en promouvant, encore une fois, la satisfaction des demandes individuelles au détriment de l’encouragement et la mise en œuvre de solidarités (y compris économique) autour des plus faibles.
A force d’édicter dans notre pays des lois qui font la promotion de l’individualisme, il n’est guère étonnant de voir une société qui dysfonctionne dans sa vie commune. A force de légiférer pour donner des autorisations de donner la mort, il n’est pas étonnant de voir une société devenir de plus en plus violente.
Certes la campagne électorale qui s’annonce va être courte, mais les citoyens que vous êtes auront sans doute à questionner les personnes qui vont solliciter leur vote sur la philosophie et la spiritualité qui les habitent pour sonder s’ils ont les capacités de discernement moral sur les questions qui touchent à la personne humaine et au bien commun, car toutes les autres questions à traiter en société en découlent.