Par le Père Antoine Vairon
Lorsque les feuilles des arbres commencent à prendre des couleurs dorées et que nous ressortons quelques bons pulls de nos placards, s’annonce dans le quartier de Buzenval la fête des vendanges.
Dans des quartiers de grandes métropoles comme la nôtre, fussent-ils parfois des quartiers pavillonnaires un peu plus verts, une telle fête des vendanges ne saurait être réduite à un caractère folklorique ou nostalgique. Elle parle de nos racines humaines, elle parle du rythme des saisons et de leur beauté, elle parle de la terre qui nous nourrit et à laquelle nous sommes profondément liés, elle parle du génie humain qui cultive la terre qui lui est confiée et doit le faire avec soin et responsabilité.
Dans un lieu qui m’est cher et qui a compté spirituellement dans mon histoire personnelle, la basilique Sainte Marie-Madeleine de Vézelay, on retrouve à l’intérieur du narthex, sur le grand tympan bien connu qui représente la Pentecôte, toute une série de petites vignettes en bas-relief disposées en arc de cercle qui nous parlent du temps qui passe. Le temps céleste s’harmonise avec le temps terrestre, puisque les signes du zodiaque s’intercalent avec des représentations de chaque mois de l’année, reconnaissables à leur représentation des travaux de chaque saison.
Aux visiteurs ou pèlerins avisés, il n’échappe pas que la toute première et la toute dernière de ces petites représentations sont assorties de deux symboles qui parlent à notre âme chrétienne : au mois de janvier, assis confortablement au coin du feu, un petit bonhomme saisit une miche de pain. À l’autre extrémité de l’année, en décembre, c’est aussi à l’intérieur, protégé des froids de l’hiver, qu’un autre homme se réjouit de la coupe qu’il tient à la main.
Le pain et le vin, au début et à la fin de l’écoulement de toute une année : le symbole est clair. La sainte Eucharistie, dans laquelle le Christ se saisit de l’offrande simple et belle que nous lui faisons : un peu de pain et un peu de vin dans lesquels sont présentés le labeur de nos vies et l’amour de nos cœurs, pour les consacrer et en faire le signe même de sa présence au milieu de nous. Bonté par laquelle il se fait lui-même, dans le pain de vie et la coupe du salut, la nourriture de nos âmes pour la vie éternelle. Encadrant la succession des mois, ces représentations nous indiquent que c’est tout le déroulement de l’année qui va être accompagné par la célébration de l’Eucharistie, source vive d’éternité s’écoulant dans la succession de nos jours.
C’est donc avec grand plaisir que nous allons célébrer la messe au cœur de cette fête des vendanges, en l’église Saint-Joseph de Buzenval, au moment où vient de s’ouvrir le 30 septembre l’année jubilaire de son centenaire : elle souligne conjointement la saveur et le poids d’éternité de nos vies d’hommes et de femmes, vécues dans l’écoulement du temps.