Par André Haurine, diacre
Je pourrais vous parler du repas Eucharistique qui, à chaque messe, nous permet de faire corps avec le Christ. Ce repas est le cœur de notre vie de chrétiens. Mais je vais vous parler de deux autres repas qui ont changé ma vie.
Décembre 1979, François, un ami prêtre du diocèse de Bordeaux, chez qui j’habitais, m’a dit : “ce soir, je participe à un temps de rencontre avec des personnes handicapées mentales et des jeunes. Il y a un temps de prière et un repas partagé. Si tu veux venir…” Comme je n’avais rien de prévu, j’y suis allé. Ce fut ma première rencontre « Foi et lumière ». Pendant ce dîner, je me disais : voilà un groupe où on n’a rien à prouver. Ce qui compte ce n’est pas ce que l’on fait, nos diplômes, notre savoir. Ce qui se vit c’est un « être avec », être ensemble tout simplement, sourire, fêter un anniversaire avec un simple gâteau, faire attention à l’autre. A cette époque je me posais beaucoup de questions sur mon avenir : quel travail, où allais-je vivre ? pourrais-je rencontrer quelqu’un qui m’aime en étant aveugle ? Passerais-je ma vie seul ?
Ce repas a changé ma vie, j’ai réalisé que j’avais quelque chose à donner avec mes forces mais aussi mes faiblesses, mes richesses mais aussi mes manques. J’ai découvert ce soir-là que ce que le Seigneur souhaite, c’est un cœur à cœur avec nous. Même les personnes les plus fragiles peuvent vivre ce cœur à cœur. Il est grand le mystère de la Foi ! Nous le chantons à chaque messe. J’ai commencé à le découvrir ce soir-là.
« Foi et lumière » a édifié ma vie, notre vie de couple. « Foi et lumière » m’a conduit au diaconat.
Juin 1992. Repas de fin d’année de l’équipe paroissiale. En chemin : petite dispute avec Marie-Catherine pour une broutille. Marie-Catherine me dit : “si un jour on te demande d’être ordonné diacre, on aura intérêt à changer notre quotidien.” Et c’est ce soir-là, pendant le repas, que l’équipe paroissiale m’a interpellé, et m’a invité à réfléchir au diaconat. Dieu ne manque pas d’humour ! Il nous appelle avec nos forces et nos faiblesses !
Nous avions parlé plusieurs fois du diaconat en couple. C’était un des thèmes du synode diocésain auquel j’avais participé et nous nous interrogions, comme d’autres couples, j’espère, sur notre vie de Foi, sur notre relation à Dieu et sur nos engagements. Y penser est une chose, se mettre en chemin suite à une interpellation, ça bouscule. Beaucoup de questions surviennent.
Qu’est-ce que c’est vraiment le diaconat ? Qu’est-ce que cela va changer dans ma vie, dans notre vie de couple, pour nos enfants, pour notre vie de Foi. Être ordonné diacre, pour quoi ? J’ai indiqué ce soir-là à l’équipe paroissiale que j’allais réfléchir, et que je leur demandais de garder cette interpellation secrète, ce que l’équipe a très bien fait. Nous avons appelé quelques amis, dont François, mon ami prêtre, pour qu’ils portent cette interpellation dans la prière. Dès le lendemain, j’ai pris contact avec notre évêque, Mgr Favreau, pour parler avec lui de cette interpellation. Pouvait-il envisager de m’ordonner étant une personne handicapée ?
Oui, après ce repas notre vie de couple a été bousculée, nous nous sommes mis en chemin, j’ai été ordonné le 25 mai 1997.
Pour l’avoir expérimenté plusieurs fois, je crois que les repas sont de bons lieux pour interpeller. Il y a la convivialité, la confiance, un climat d’écoute. On peut prendre un peu de temps pour parler, poser quelques questions, échanger. On n’a pas à répondre aussitôt. Pensez au repas si vous avez un appel à faire, une question à poser, un service à demander, une mission à confier pour l’Eglise.
Voilà deux repas qui ont changé ma vie. 43 ans de présence à Foi et lumière, 25 ans d’ordination, j’ai beaucoup de chance. Le Seigneur me comble chaque jour, il me soutient dans les moments difficiles et il y en a !
Merci à Marie-Catherine pour son soutien et son accompagnement de chaque jour dans mon ministère.
Merci pour ces deux oui, celui du 24 avril 1982, jour de notre mariage, et celui du 25 mai 1997, jour de mon ordination.