Extrait du Message du pape François pour la Célébration de la 55è journée mondiale de la Paix, 1er Janvier 2022 : « Dialogue entre générations, éducation et travail : des outils pour construire une paix durable »
Dans un monde toujours en proie à la pandémie qui a causé tant de maux, « certains essaient de fuir la réalité en se réfugiant dans leurs mondes à eux, d’autres l’affrontent en se servant de la violence destructrice. Cependant, entre l’indifférence égoïste et la protestation violente, une option est toujours possible : le dialogue. Le dialogue entre les générations ».
Tout dialogue sincère, même s’il n’est pas dépourvu d’une dialectique juste et positive, requiert toujours une confiance fondamentale entre les interlocuteurs. Nous devons retrouver cette confiance mutuelle ! La crise sanitaire actuelle a accru pour tout le monde le sentiment de solitude et de repli sur soi. La solitude des personnes âgées s’accompagne chez les jeunes d’un sentiment d’impuissance et de l’absence d’une idée commune de l’avenir. Cette crise est certainement douloureuse. Mais c’est aussi une crise qui peut faire ressortir le meilleur des personnes. En effet, pendant la pandémie, nous avons vu de généreux témoignages de compassion, de partage et de solidarité dans le monde entier.
Le dialogue consiste à s’écouter, discuter, se mettre d’accord et cheminer ensemble. Favoriser tout cela entre les générations signifie labourer le sol dur et stérile du conflit et du rejet pour cultiver les semences d’une paix durable et partagée.
Alors que le développement technologique et économique a souvent divisé les générations, les crises contemporaines révèlent l’urgence de leur alliance. D’une part les jeunes ont besoin de l’expérience existentielle, sapientielle et spirituelle des personnes âgées ; d’autre part les personnes âgées ont besoin du soutien, de l’affection, de la créativité et du dynamisme des jeunes.
Les grands défis sociaux et les processus de pacification ne peuvent se passer du dialogue entre les gardiens de la mémoire – les personnes âgées – et ceux qui font avancer l’histoire – les jeunes – ; pas plus que de la disponibilité de chacun pour faire place à l’autre, pour ne pas prétendre occuper toute la scène en poursuivant des intérêts immédiats comme s’il n’y avait ni passé ni avenir. La crise mondiale que nous vivons nous montre que la rencontre et le dialogue entre les générations sont le moteur d’une politique saine qui ne se contente pas de gérer le présent « avec des rapiècements ou des solutions rapides », mais qui se propose comme une forme éminente d’amour de l’autre, dans la recherche de projets communs et durables.
Si, face aux difficultés, nous savons pratiquer ce dialogue intergénérationnel, « nous pourrons être bien enracinés dans le présent, et, de là, fréquenter le passé et l’avenir : fréquenter le passé, pour apprendre de l’histoire et pour guérir les blessures qui parfois nous conditionnent ; fréquenter l’avenir pour nourrir l’enthousiasme, faire germer des rêves, susciter des prophéties, faire fleurir des espérances. De cette manière, nous pourrons, unis, apprendre les uns des autres ». Sans racines, comment les arbres pourraient-ils pousser et porter des fruits ?
Il suffit de penser à la question du soin de notre maison commune. L’environnement, en effet, est « un prêt que chaque génération reçoit et doit transmettre à la génération suivante », Nous devons donc apprécier et encourager les nombreux jeunes qui s’engagent pour un monde plus juste et attentif à la sauvegarde de la création confiée à nos soins. Ils le font avec préoccupation et enthousiasme, et surtout avec un sens des responsabilités face à l’urgent changement de direction que nous imposent les difficultés nées de la crise éthique et socio-environnementale actuelle.
Par ailleurs, la possibilité de construire ensemble des chemins de paix ne peut être séparée de l’éducation et du travail qui sont des lieux et des contextes privilégiés pour le dialogue intergénérationnel. C’est l’éducation qui fournit la grammaire du dialogue entre les générations, et c’est dans l’expérience du travail que des hommes et des femmes de différentes générations se retrouvent à collaborer, à échanger des connaissances, des expériences et des compétences en vue du bien commun.