Par le Père Antoine Vairon
Nous voilà au seuil du Carême, qui commencera mercredi. Quand notre train va partir, mieux vaut être monté à bord si on veut arriver à destination. Certes, toute métaphore a ses limites, mais vous avez compris l’image : ne pas manquer le départ. Car c’est bien une résolution spirituelle, une détermination claire que le Seigneur attend de nous pour entrer dans ce temps privilégié, dans ce temps de grâce que nous offre l’Eglise pour nous préparer à fêter dignement la Pâque du Christ dans quelques semaines.
Et notre carême de cette année va procéder d’un double mouvement. Mouvement de recueillement et d’intensification dans la prière d’une part. Mouvement de charité d’autre part.
Vous le savez bien, il y a dans nos vies des tristesses et des fatigues dont la cause est proprement spirituelle. Déceptions de nous-mêmes et des autres qui sont le signe d’une perte d’espérance. Lassitudes dans notre vie de prière personnelle ou communautaire – spécialement dans la vie sacramentelle- qui sont conséquence d’un refroidissement de notre amour du Seigneur. Aigreurs et dureté du jugement, amertumes dans les paroles qui indiquent que nous faisons les choses par nous-mêmes, et non plus dans le souffle vivifiant de l’Esprit-Saint qui renouvelle toute chose et garde l’Eglise dans l’unité et la charité fraternelle.
Qu’offre le Carême ? Une cure de jouvence. « Car chaque année tu accordes à tes fidèles de se préparer aux fêtes pascales dans la joie d’un cœur purifié ; de sorte qu’en s’adonnant à une prière plus fervente et à une charité plus active, fidèles aux sacrements qui les ont fait renaître, ils soient comblés de la grâce que tu réserve à tes enfants », nous fera prier la première préface de ce temps.
Dans cette souplesse retrouvée, le Sacrement de la Réconciliation joue un rôle précieux, car il nous tourne avec humilité vers la bonté du Père qui nous appelle, il nous fait voir lucidement notre vie dans la douce lumière de l’Esprit-Saint, il nous fait accueillir la grâce du pardon que Jésus a acquis pour nous au prix de sa Croix. Et nous voilà renouvelés dans la grâce de notre baptême. Faut-il rappeler que pour pouvoir s’approcher de la communion eucharistique, il faut s’être confessé depuis moins d’un an ? Les prêtres, à la fois serviteurs et aussi bénéficiaires de ce sacrement, connaissent bien les réticences qui font que parfois les baptisés ne sont pas confessés depuis bien plus longtemps. Mais ils encouragent en rappelant le cri du Seigneur qui retenti dès le mercredi des cendres : « ‘Maintenant – oracle du Seigneur – revenez à moi de tout votre cœur, dans le jeûne, les larmes et le deuil !’ (…) Revenez au Seigneur votre Dieu car il est tendre et miséricordieux » (Joël 3, 12-13). Les prêtres de nos paroisses de Rueil ont entendu l’appel de notre évêque à se rendre plus disponibles pour les confessions. Que les fidèles entendent l’appel du Seigneur à recevoir cette grâce offerte.
L’autre mouvement, celui qui nous tourne vers les autres, celui de la charité multiforme et créative, naîtra de ce cette ferveur ravivée. La vie chrétienne ne se caractérise pas par une simple générosité personnelle, aussi motivée soit-elle. L’Eglise n’est pas une ONG, aussi grande soit-elle sur les 5 continents. La vie chrétienne est vie dans l’Esprit-Saint, l’Esprit de Charité qui ajuste notre action à l’action de Dieu. La charité de l’Eglise s’exprime tant par notre action individuelle qu’organisée. Dieu réalise son œuvre par les cœurs qui lui sont ouverts et disponibles. Action locale, entraide internationale : que nos cœurs soient attentifs et souples aux ‘motions’ -mouvements intérieurs qui nous suscitent- de l’Esprit.
Allons, que ce Carême soit fervent et bénéfique pour nos communautés paroissiales et chacun de nous !
Et nous pouvons déjà faire nôtre l’oraison du mercredi des Cendres, et le désir qui l’accompagne :
Accorde-nous, Seigneur,
de savoir commencer saintement,
par une journée de jeûne,
notre entraînement au combat spirituel :
que nos privations nous rendent plus forts
pour lutter contre l’esprit du mal.
Par le Christ, notre Seigneur, Amen.