Par le Père Guillaume Leclerc
En cette semaine pour l’unité des chrétiens, le Pape François a fait un cadeau magnifique à l’Eglise tout entière en même temps qu’il honorait la France : il vient en effet de proclamer « Docteur de l’unité » saint Irénée, le deuxième évêque de Lyon, successeur direct du vieux martyr Pothin.
Puisant toute sa sagesse à la source des Ecritures, Irénée a beaucoup pour plaire à nos frères protestants.
Il est aussi cher à nos frères orthodoxes, lui qui insiste fortement sur la fidélité droite aux apôtres et à leurs successeurs. Il se place ainsi dans une grande chaîne de témoins qui ont transmis la foi comme un trésor :
« Cette foi, nous l’avons reçue de l’Eglise et nous la conservons : la foi, par l’œuvre de l’Esprit de Dieu, comme un dépôt précieux conservé dans un vase de valeur, rajeunit toujours et fait rajeunir également le vase qui la contient. Là où est l’Eglise se trouve l’Esprit de Dieu, et là où est l’Esprit de Dieu, se trouve l’Eglise et toute grâce ».
Si la foi est faite pour rajeunir, se dire avec des mots renouvelés et approfondis en Eglise, elle ne peut que se dénaturer en dehors d’elle. Irénée alerte contre un courant séparatiste, la gnose. Ce courant intellectuel et élitiste opposait la foi des pasteurs et des assemblées, à peine bonne à ses yeux pour les pauvres et les simples, à une science supérieure et cachée qui aurait été accessible par degrés aux initiés. Coupée de la communauté de foi, la gnose proliférait en une multitude de sectes divergentes. Faisant l’impasse sur le mystère de la Croix, elle expliquait le mal en condamnant la matière, et particulièrement le corps et la chair.
Les alertes d’Irénée ont-elles perdu leur valeur ? Nous le voyons sur les réseaux sociaux et ailleurs, l’information trafiquée se porte bien. Beaucoup vendent comme délectables “l’eau dérobée et le pain pris en secret” (Pv 9,17). Plus que jamais, nous avons besoin d’aller à la vraie Source spirituelle, de boire l’eau vive partagée par les apôtres et leurs successeurs, pour devenir nous-mêmes des fontaines et non des mares croupissantes. Nous avons besoin d’une annonce simple de la foi, ouverte à tous et sans surplomb, ne méprisant la recherche et la piété de personne. Nous sommes appelés à faire rayonner le corps autant que l’esprit, sans en faire des repoussoirs ni des idoles, causes de bien des abus.
Finalement, nous avons besoin de nous laisser unifier, simplifier : clarifier notre communion avec le Seigneur, en même temps qu’élargir notre communion fraternelle. L’une ne se fera pas sans l’autre.