Service de la compassion, ce qui nous attend
Père Antoine Vairon
Comme j’aime cette définition de l’Eglise lancée par Saint Paul au détour d’une phrase : “un peuple ardent à faire le bien” (Tite 2, 14).
Je pense que, comme moi, vous avez été touchés ces dernières semaines d’entendre tant de nouvelles de décès parmi les aînés dans nos familles, notre entourage et notre pays. Et que, comme moi, vous avez été absolument bouleversés d’apprendre les situations dramatiques de personnes âgées dans les maisons de retraite (comme notre évêque le suggérait récemment, laissons l’acronyme EHPAD pour les documents administratifs, et utilisons du vocabulaire porteur de sens et de chaleur humaine). La situation présente, les réductions de personnels aptes à tenir leurs postes, l’interdiction faite des familles, aux bénévoles et aux aumôniers de venir visiter les personnes ont créé des situations de solitudes si douloureuses. Et nos aînés à domicile dont l’isolement pouvait être grand lui aussi.
Dès le début du confinement, vous avez fait un travail admirable pour vous préoccuper de votre voisinage. Et tant de solidarités se sont déployées. Dans les premiers temps de la mise en place de la réserve citoyenne par la municipalité, ce sont rapidement environ un millier de rueillois qui s’y sont inscrits. Et il y avait moins de 200 personnes à aider (courses à faire, téléphone pour rompre l’isolement). J’y ai vu le signe que l’élan de solidarité dans notre ville avait été très fort avant même cette belle initiative, et n’avait pas laissé beaucoup de personnes -autant qu’on le sache- sans soutien. Et c’est heureux.
Nos équipes paroissiales se sont organisées très vite pour recouper les informations des personnes qui étaient appelées régulièrement au téléphone, afin d’éviter, autant que possible, que certains soient laissés de côté et pour se répartir le suivi des appels réguliers.
Mais comment allons-nous faire demain ?
Avant le confinement, nous avions sur nos paroisses une équipe de la pastorale de la santé très dévouée, mais dont certains membres sont au service depuis de nombreuses années, et les effectifs sont clairement insuffisants (certaines maisons de retraite n’avaient qu’une mini-équipe de 2-3 paroissiens pour aller visiter).
Visites dans les maisons de retraite, visites à domicile, équipe pour porter la communion. Qui va s’en charger ? Allons-nous reprendre comme avant ou bien le “monde d’après” qui est dans nos réflexions et nos aspirations pour beaucoup commence déjà là : par la place du service du frère dans nos communautés paroissiales. Service du frère, service de la compassion. Développement de la personne, service de la charité.
Parlons-nous franchement : nous ne savons pas encore quelles modalités pratiques vont s’imposer à nous. Quelles organisations seront possibles ? La difficulté est réelle. Nous en parlons avec les responsables de nos mouvements caritatifs et des spécialistes de l’engagement bénévole. Comment mettre en route de nouveaux bénévoles sans pouvoir identifier le cadre de l’action ?
Et pourtant, il nous faut être réellement prêts à nous mobiliser. Quel temps serez-vous prêts à donner pour cela ? Quelle priorité pour le service des plus fragiles et des plus pauvres ?
Nous sommes attendus là. Par nos frères âgés ou en fragilité. Par le Christ qui nous envoie être ses mains, sa bouche, ses yeux, sa compassion auprès d’eux.
Le service de la compassion doit être une de nos priorités à la sortie de ce confinement et pour les mois qui viennent. Nous ne pouvons pas encore organiser l’action. Commençons par y préparer nos coeurs.