par Blandine Chancerelle
Mardi, 18h30. L’heure de finir sa journée de travail. Mardi, un soir de semaine comme les autres ? Pas tout à fait… car nous avions mieux à faire que de rentrer chez nous… Mardi, un soir où il faisait beau -enfin ! – le printemps nous offrant ainsi sa douceur et ses promesses de meilleurs jours donnant si bien la tonalité à la messe qui nous rassemblait à Notre-Dame de la Compassion. Car il s’agissait bien d’assister à un engagement : celui de Guillaume Douet et d’Henri de Guillebon à servir l’Eglise par leur institution de « lecteurs » et « d’acolytes ». Nous étions nombreux dans l’église : curieux de découvrir ce qui se cachait derrière ces termes, touchés de voir aboutir leur long chemin de discernement, désireux d’être là pour eux.
Rien d’extra-ordinaire dans le déroulement de la messe mais chaque moment était exhaussé par la présence de ces deux hommes qui acceptaient une mission à vie. Deux hommes à la personnalité différente montrant la richesse de l’Eglise servante : Henri, discret, trouvant le lieu de sa vocation dans les rencontres en face à face auprès des SDF lors de maraudes, des personnes âgées lorsqu’il leur apporte l’eucharistie dans les maisons de retraite ; Guillaume, connu pour ses animations liturgiques, son enthousiasme à aller chercher ceux qui sont loin de Dieu, pour son sens large de l’hospitalité, soutenu par Anne, sa femme, associée pleinement à cette décision qui se vit en couple et accompagné par leurs trois enfants qui leur témoignent tendresse et fierté.
A l’appel du Père Hugues de Woillemont, l’un et l’autre se sont dressés debout au milieu de notre assemblée et ont répondu « Me voici ». Debout face aux quinze prêtres, trois diacres et au pasteur pour les laisser les accueillir. En aube, pour signifier qu’il ne s’agit pas de devenir des « supers-laïcs » : ils revêtent ce vêtement pour incarner le ministère de leur future ordination de diacres. Ils se sont ensuite succédé, à genoux cette fois comme s’enracinant, pour recevoir le livre de la parole qu’ils ont lu ou psalmodié afin de nous partager le fruit de leur foi.
La célébration avançant, ils ont franchi les marches de l’autel et comme « compagnons du Christ » voués à apporter l’eucharistie, ils ont rejoint la communauté des hommes d’Eglise. C’était à notre tour de les avoir face à nous. Eux qui semblaient auréolés, sous la croix, par la fresque aux trois couleurs qui se mariaient à ces instants que nous vivions. Trois couleurs : le rouge de la vie, de l’amour, des yeux humides des proches, des joues de Guillaume trahissant son émotion ; le jaune de la joie, des applaudissements qui jaillissent, des éclats de reconnaissances des enfants de chœur, de l’énergie des animatrices, des musiciens ; et le orange, couleur du mélange, celui des bruits de la rue provenant de la porte ouverte avec le babillage d’un bébé, celui des générations : les anciens, piliers de paroisse réunis avec les ados ajoutant par leurs tenues scoutes d’autres teintes encore.
Ce mardi soir a fini avec le vert, celui de la pelouse sur laquelle nous nous sommes retrouvés, portés par la paix partagée pendant cette messe. Et nous avons échangé, recoupé des anecdotes et mis enfin du sens à ces WE mystérieux durant lesquelles Henri et Guillaume discernaient et se formaient en toute discrétion, nous avons ri, bu un verre de l’amitié, joué au foot… toutes ces choses que l’on fait ensemble lorsqu’on se sent en famille…